
30 oct. 2025 / Olivier Unia
“Chuter et se relever” – Histoire d'une image
“Chuter et se relever” – Rencontre avec Olivier Unia, lauréat des Sony World Photography Awards 2025
par Olivier Unia
Nous avons rencontré Olivier Unia au Salon de la Photo à Paris, six mois après son sacre aux Sony World Photography Awards 2025. Le photographe français, installé au Maroc depuis 17 ans, a remporté ce prestigieux prix pour une image bouleversante prise lors d’une Tbourida, une spectaculaire manifestation équestre marocaine.
L’image, réalisée avec le TAMRON 35-150mm F/2-2.8 Di III VXD (modèle A058), capture un instant suspendu : un cavalier en pleine chute, dans la poussière et la lumière dorée du couchant. Pour certain une scène synonyme d’échec — lui, y a vu au contraire une métaphore de la vie : tomber, se relever, et continuer à avancer « il faut être un brave pour remonter ».
Rencontre avec un photographe libre, sincère, toujours prêt à saisir l’éphémère d’une émotion.

Olivier, peux-tu nous raconter la genèse de cette image extraordinaire ?
La Tbourida est héritée de traditions séculaires profondément enracinées dans la culture marocaine. Son nom provient de l’arabe tbaroud, qui désigne ces démonstrations où des cavaliers, réalisent des charges coordonnées avant de tirer en l’air dans un même élan. Ce rituel spectaculaire incarne la bravoure, la maîtrise et l’héritage guerrier des cavaliers marocains. La Tbourida est devenu un sport codifié depuis 2000 avec des compétitions dans toutes les régions du royaume et désormais inscrite au patrimoine de l’UNESCO.
En termes de capture d’images c’est un moment intense où tout va très vite, la plupart des photographes prennent les photos des chevaux alignés, de face, avec les cavaliers qui tirent à la poudre noire, voulant surtout saisir la parfaite synchronisation de l’équipe.
J’étais dans une démarche différente, décalé, témoin presque invité, je voulais capter autre chose, faire un pas de côté et sortir du cadre habituel. J’essaye humblement d’avoir une approche plus artistique que documentariste. C’est là que la photo de la « chute » prend toute sa dimension. Elle sort aussi du cadre, là où il faut montrer de la puissance et de la performance, j’ai immortalisé un instant humain, une faille. Lors de l’événement, certains m’ont suggéré de l’effacer — car c’était perçu culturellement comme un échec. Mais pour moi, tomber fait partie de la vie d’un cavalier. Cette image est un symbole, elle représente le courage et la force nécessaires pour se relever. C’est pour moi une métaphore puissante de la résilience et du courage.

Tu as un lien particulier avec les chevaux, n'est-ce pas ? Peux-tu nous en parler davantage ?
Effectivement, cela remonte à mon enfance en Bretagne, où j’ai fait beaucoup d’équitation, surtout du CSO. Dans mon club j’ai même été moniteur très jeune, vers 14 ans. Tomber fait partie de l’apprentissage et on nous apprend à ne pas prendre cela comme un échec et surtout à vaincre nos peurs. Cette période m’a permis de comprendre cette relation unique entre le cavalier et sa monture et d’apprendre une forme de résilience. C’est ce lien presque symbiotique, que j’aime à refléter dans mes photos équestres.
Récemment, j’ai couvert un concours de saut d’obstacles du Longines Global Champions Tours (les 40 meilleurs cavaliers au monde). C’est incroyable de voir à quel point le cavalier est connecté avec son cheval, on dit même que leurs cœurs se synchronisent pendant l’épreuve. J’ai essayé de capter ce partage émotionnel dans mon travail et c’est cette compréhension intime qui m’aide à photographier ces moments de manière authentique.

Pourquoi avoir le Tamron 35-150mm, pour couvrir ce type d’événements ?
J’ai un rapport particulier avec cette optique. Pendant le Covid, j’ai décidé de me lancer plus sérieusement dans la photographie. J’ai toujours été un peu geek de matériel photo, et c’est un test de Damien Bernal sur le 35-150mm qui m’a convaincu d’essayer cet objectif. Je me souviens avoir demandé à un de mes amis en France de me le commander immédiatement, intuition bien sentie car c’était un des rares exemplaire dispo avant la rupture de stock mondiale sur ce modèle.
J’ai utilisé cet objectif pour ma première exposition « Street Photography » à Rabat en 2022. Les résultats ont été incroyables. Je n’utilisais plus mon 24-70mm, je ne faisais que sortir avec le 35-150mm qui ouvre à f/2. Cet objectif m’a permis d’explorer des angles et des perspectives que je n’aurais pas pu capter autrement.
Qu’est-ce qui t’a convaincu dans cette approche polyvalente ?
Je tiens à préciser que je ne photographie pas que des chevaux, mes centres d’intérêts sont aussi divers que variés (ex : street photo, concerts, etc.) et ce qui compte pour moi, en toutes circonstances, c’est la polyvalence associé à la qualité, deux paramètres fondamentaux pas si simple à concevoir et ce 35-150mm est unique pour cela. Je peux réaliser presque 98% des photos dont j’ai besoin uniquement avec cet objectif. La liberté créative qu’il m’offre est essentielle. Dans tous les sujets que j’aborde l’action est essentielle, c’est je pense ce qui caractérise le plus mon style et cet objectif me permet de capturer les moments décisifs sans perdre un instant.
Certains disent qu’une focale fixe est le meilleur choix, chacun sa vision mais personnellement je ne suis pas d’accord avec cette approche. Ce que je recherche avant tout, c’est de pouvoir saisir l'instant — qu’il soit doux ou brutal. La plage focale de cette optique permet de ne pas rater ces moments. Au lieu de changer d’objectif ou de changer de boitier je peux grâce à lui capter ces instants si rapides et fugaces. Ce zoom m’a permis de capturer la chute du cavalier, un moment que j’aurais peut-être raté autrement, ce sont ces instants-là qui, pour moi, sont les plus précieux.


Comment utilises-tu cet objectif en street photo ?
En street photo, la spontanéité est essentielle. Je me promène, je scrute les expressions et dès qu’un moment, un visage, un regard me touche, je prends la photo, parfois sans même prévenir la personne. Puis je lui montre la photo et, si elle est d’accord, je publie l’image.
Contrairement à l’iconographie classique de la photo de rue je ne shoot pas souvent en plan large, dans les pays où je travaille souvent la street-photo n’est pas toujours très bien acceptée, je me suis adapté en rapprochant mon cadre, en zoomant, en évitant de multiplier les personnes sur ma photo car elles pourraient être autant de refus d’apparaitre dessus. Petit à petit cela s’est transformé en portraits volés dans la rue.
Un exemple : une fois, au Benin, à la sortie d’un festival de musique je vois au loin une femme. De nuit, sans éclairages publique, je regrettais de ne pas pouvoir photographier ce si joli visage par manque de lumière quand tout à coup comme par magie il a été illuminé l’espace d’une micro seconde par les phares d’une voiture qui passe. Puis elle a disparu dans la foule. Après avoir montré la photo à des amis ils l’ont reconnue, c’était une présentatrice de Canal+ international. Via les réseaux je suis rentré en contact avec elle et comme elle a adoré le cliché nous sommes en contact régulièrement et à mon prochain voyage au Benin nous referont un vrai shooting cette fois.
Cet objectif me permet de changer de focale rapidement et de capter l’émotion du moment, même lorsque la lumière est faible. C’est un objectif qui facilite la rencontre et la connexion humaine, et je pense que c’est ça, la magie de la photo de rue.
Quels sont tes projets futurs ?
J’ai plusieurs projets à venir, notamment un livre qui sera l’aboutissement des 2 ans de travails photo autour de la Tbourida, et aussi de nouvelles expositions, des conférences. Ayant également signé dans une agence photo j’ai des idées de reportage et documentaire que je développe. Je souhaite continuer à créer des œuvres qui font sens à un niveau humain et esthétique. Le 35-150mm restera sans doute mon outil principal pour capter ces instants.
A propos de l'auteur : Olivier Unia

Franco espagnol basé à Rabat (Maroc) depuis 2009. Musicien durant 35 ans, la photographie de reportage et documentaire est devenu, depuis le covid, mon activité principale. Je n’aime photographier que deux choses : tout ce qui bouge et tout ce qui ne bouge pas. Je voyage dans tout le Maroc, mais aussi en Afrique de l’Ouest, pour mener à bien des projets qui s'étalent sur quelques heures, quelques jours ou quelques années. J’essaye de saisir une émotion, une intensité, et de les figer en un instant suspendu.
Produits TAMRON mentionnés dans cet article
35-150mm F/2-2.8 Di III VXD
Modèle A058








